Après plus de vingt ans de traversée du désert, les fans de Dune ont enfin quelque chose à se mettre sous la dent ! En plus du film éponyme de Denis Villeneuve, le studio Shiro Games nous propose l’early access de son nouveau jeu situé sur Arrakis. Dune : Spice Wars reprend la formule à succès de Northgard et l’adapte dans l’univers délicieusement sombre de Frank Herbert.
Comme on peut s’en douter, Dune se déroule sur une planète entièrement désertique, ce qui offre bien peu de variété. Mais comme l’a expliqué Jérémy Vitry, le directeur artistique du jeu, les possibilités ne sont pas pour autant fermées ; Shiro Games a adapté un style cartoonesque afin d’avoir le plus de malléabilité possible concernant le sable. Celui-ci se décline sous diverses formes et nuances, offrant un large cadre qui dépeint parfaitement l’immense dangerosité d’Arrakis. Des plaines et vallées serpentent entre les hauteurs rocheuses, tandis que d’immenses volcans éteints définissent l’aspect stratégique de la map. A l’image du film de Villeneuve, on se laissera parfois rêvasser dans le paysage de dunes sablonneuses !
Dune : Spice Wars est un jeu de domination, où la faction qui acquiert le plus d’Hégémonie gagne la partie. Quatre factions sont pour l’instant jouables : les Harkonnen, les Atréides, les Fremen et les Contrebandiers. Shiro Games a indiqué que d’autres factions seraient ajoutées, certaines pouvant même avoir été créées en-dehors du canon officiel de l’univers.
J’ai pu tester un peu la brutalité des Harkonnen, mais c’est avec les Atréides que j’ai conquis ma première partie. En tant que 4X en temps réel, Spice Wars s’axe sur des actions qui prennent plusieurs jours (la mesure du temps en jeu) pour se concrétiser, mais également des micro-actions en temps réel. On se retrouve donc avec une map dynamique, qui évolue au fur et à mesure des régions que l’on acquiert (par la force ou la négociation) et des ressources. Celles-ci sont réparties sur la map et ne peuvent pas être plus d’une par région.
On retrouve les ressources suivantes, dont les noms sont parfois en anglais :
- Épice (la fameuse ressource native d’Arrakis, qui fait couler tant de sang)
- Solari (monnaie)
- Plastcrete (matériau de construction de base)
- Main d’oeuvre (alimente en continu vos unités militaires et civiles)
- Batteries (nécessaires au maintien de vos machines)
- Eau (nécessaire au maintien de vos colonies et unités)
- Autorité (nécessaire au maintien de vos colonies)
- Hégémonie (ressource finale permettant de gagner la partie, générée par les bâtiments et actions)
Bien évidemment, la maîtrise d’Arrakis tourne autour d’une seule chose : l’épice. Nécessaire aux voyages intersidéraux, cette précieuse ressource est rare, et devra être récoltée par les Harvesters nécessaires. Vous devrez les protéger des attaques ennemies, mais également des vers des sables, qui pourront les engloutir en un clignement d’œil. Son taux d’échange, fixé par la Compagnie des Honnêtes Ober Marchands, déterminera votre principale source de revenus en Solari. Mais si l’épice est le cœur battant de l’Imperium, votre empire local aura également besoin d’autres ressources pour se maintenir et se développer ; capturer des régions requerra des investissements particuliers et, au final, des décisions stratégiques basées sur des choix de moyen terme. Qu’elle soit pacifique ou militaire, la conquête de la map se fera à pas mesurés et réfléchis.
La diplomatie est également importante, mais manque clairement de finitions. Les interactions entre factions sont minimes, et les échanges paraissent plutôt superficiels ; on a l’impression que Shiro Games n’a que timidement caressé cet aspect du jeu sans oser embrasser toute la complexité politique de Dune. On notera cependant la présence du Landsraad, dont les propositions offrent autant des bonus et des malus que des objectifs à accomplir ; cela dit, les fréquentes convocations ne brillent pas par leur diversité, et ne sont pas vraiment représentatives du puissant conseil impérial ou de sa puissance tentaculaire.
Des événements aléatoires apparaissent également, offrant parfois des quêtes spécifiques. Mais encore une fois, que ce soit sur le fond ou sur la forme, Shiro Games ne semble qu’effleurer la profondeur de Dune. On aimerait une interface plus personnalisée pour les factions, comme quelque chose d’anguleux et de sanglant pour les Harkonnen. Les écrans de missions ou de dialogues sont jolis, mais ne respirent pas la brutalité pesante qui caractérise l’œuvre de Frank Herbert. C’est dommage, car les opportunités sont nombreuses ; Shiro assume qu’une partie de son inspiration vient directement du film de Denis Villeneuve (dans Spice Wars, Liet Kynes est une jeune femme noire et non un vieil homme blanc), mais sa patte ne se fait pas assez ressentir. La direction artistique présentée est pourtant sublime, mais gagnerait à prendre davantage l’ascendant.
Peut-être est-ce quelque chose que l’on pourra voir dans la campagne, dont la sortie n’a pas encore été datée.
Le système d’espionnage est cela dit très intéressant. Pas forcément simple à prendre en main, mais sans complexité inutile, il est suffisamment malléable pour s’adapter au type de gameplay que vous souhaitez. Que vous soyez plus axé sur l’économie, l’expansion pacifique ou la guerre, vos agents pourront infiltrer tant les autres factions sur la map que les entités non-jouables, comme la CHOAM ou la Guilde spatiale ; les opérations qui seront menées sous vos ordres sont plutôt variées, même si on regrette de ne pas avoir plus de choix propres à la faction que l’on joue, et à son lore.
Même son de cloche du côté des unités : celles-ci fonctionnent beaucoup en synergies, et ont un design aussi simple qu’efficace. Cela étant dit, l’aspect militant de la conquête d’Arrakis semble un peu relégué au second plan, et n’est malheureusement pas impacté par toutes les horreurs destructrices, propres aux livres de Frank Herbert. Peut-être que cela viendra dans un second temps, avec un DLC centré sur les Sardaukars ?
En définitive, Dune : Spice Wars est un jeu en early access ; il a donc besoin d’être taillé ici et là, pour révéler le diamant qu’il est destiné à être. Shiro Games a su créer un environnement enchanteur dans lequel on a envie de se plonger, et conquérir par les moyens délicieusement complexes qui nous sont offerts. Mais ce même environnement gagnerait à être approfondi, retravaillé et magnifié. L’éditeur Funcom bénéficiant des droits exclusifs de la licence, et les fans étant avides de contenu, il serait particulièrement fun de voir Shiro embrasser pleinement Dune et son lore !